CRITIQUE – Le réalisateur de Ne le dis à Personne et des Petits Mouchoirs dévoile son septième film, le plus personnel, fruit d’une pulsion née pendant le confinement. Un exercice vain et vaniteux.
Une silhouette s’avance dans le noir jusqu’au premier rang. «Je suis venu vous remercier personnellement», entend-on soudain dans la salle de cinéma du Pathé Wepler de Paris. Surpris, les trente spectateurs venus assister, mercredi 26 octobre, à 13h30, à la projection de Lui, se demandent qui vient perturber leur séance. Une lumière de portable s’allume. C’est lui, le réalisateur de Lui. Guillaume Canet, en chair et en os. «J’ai du mal à quitter ce film. Je vous remercie d’être là», lance-t-il avant de filer comme il est venu.
Guillaume Canet dans la salle, Guillaume Canet à l’écran, et même Guillaume Canet jouant avec Guillaume Canet. Il est partout à la fois, et pour cause : ce film, c’est donc lui et pas un autre, même si dans toutes ses interviews, l’acteur et réalisateur clame le contraire. Trois semaines ont suffi pour l’écriture et quatre pour le tourner à Belle Île. Un film né d’une pulsion aussi expéditif à faire que long et pénible à regarder pour le spectateur.
Le sujet ? La panne d’inspiration et les névroses familiales d’un compositeur de musique. Un créateur, comme lui… Pour résoudre ses problèmes, et tenter de retrouver la paix, il convoque les souvenirs de sa femme (Virginie Efira impeccable), sa maîtresse (Lætitia Casta), son meilleur ami (Mathieu Kassovitz), ses parents (Nathalie Baye et Patrick Chesnais) et de son fils. Tous sont loin de ce refuge breton sur laquelle il a décidé de s’isoler, mais ils peuplent sa tête… à lui. Il y a trop de monde là-dedans vous dites-vous ? Nous aussi…
Lui 1 et Lui 2 sont dans un bateau…
L’essentiel de l’ «intrigue» se passe dans une maison aux volets bleus, abîmés par les embruns. Lui traverse donc une période de folie douce, manquant de commettre l’irréparable. En repeignant ses volets (de la même couleur que sa chemise), et en accordant le piano sur lequel il doit composer de nouveaux morceaux, lui va choisir la vie. Cette thérapie, aussi authentique et personnelle soit-elle, demeure très compliquée à suivre. Même pour lui. On peine à s’accrocher aux combats du personnage principal. Si lui ne s’aime pas, comment peut-on aimer lui dans ce huis clos d’une heure et demie ? Un vrai dilemme !
Quelques idées de mises en scène jalonnent cette histoire. Mais elles restent inabouties. Guillaume Canet s’inspire du cinéma de Bertrand Blier, comme dans cette scène où trois acteurs (le mari, sa femme et son amant ?) se retrouvent dans le même lit ou dans ce dialogue entre le compositeur (lui 1) et son double maléfique (Lui 2), portant un couteau planté dans le torse. Mais du réalisateur de Buffet froid, il n’a ni les lettres, ni l’esprit.
Le talent des seconds rôles n’y change rien. Pas même l’émouvant monologue de Virginie Efira à la fin, ni les moments de suspense et de tension que Guillaume Canet tente d’installer via la paranoïa de Guillaume Canet. Non, décidément, on s’ennuie terriblement avec Lui.
IPJ Dauphine IPJ
Cinéma, théâtre, musique… Les étudiants-journalistes d’IPJ, l’Institut Pratique du Journalisme de l’Université Paris Dauphine , proposent leur regard sur l’actualité culturelle.